42 avenue d’Iéna (Paris 16ème)

Métro : Iéna (Ligne 9)
Lieu notable : Ancien siège de la présidence commune d’Antenne 2 et de FR3 et ancien siège de France télévision
L’avenue commémore la bataille d’Iéna remportée par Napoléon Ier le 14 octobre 1806 à Iéna contre la Prusse

La symbolique est forte pour les deux chaînes du service public, Antenne 2 et FR3, qui doivent mener bataille contre TF1, La Cinq et M6. L’installation en 1989 de la présidence commune de la deuxième et de la troisième chaîne avenue d’Iéna laisse tout du moins transparaître la volonté politique de redonner des victoires au service public dans un paysage audiovisuel hautement concurrentiel. 
Pour comprendre les enjeux qui s’imposent cette année-là, il est nécessaire de se remettre dans le contexte. Depuis 5 ans, la France a vécu une transition singulière avec la création de la première chaîne privée à péage (Canal+), la fin du monopole des chaînes publiques avec l’arrivée des chaînes privées gratuites (TV6/M6 et La Cinq) puis la privatisation de la doyenne des chaînes du service public (TF1). La rentrée télévisuelle du mois de septembre 1987 est sans doute celle qui ouvre une grande période de rude concurrence entre les différentes chaînes de la télévision française. Le service public composé d’Antenne 2 et d’FR3 entame une période de crise qui s’exprime notamment à travers le recul de leurs audiences. En 1988, la gauche revient au pouvoir et il lui apparaît nécessaire de consolider l’audiovisuel public. Si pendant un temps, il est envisagé la renationalisation de TF1, le projet est vite abandonné. Reste alors à trouver une solution pour renforcer la 2ème chaîne et la 3ème chaîne. Comble de l’histoire, ce serait une conversation entre Patrick Le Lay, PDG de TF1, et Jack Lang, ministre de la Culture, que l’idée d’une présidence commune aurait été évoquée. Le principe est, tout en gardant l’identité et l’autonomie juridique des deux chaînes, de mettre en œuvre une complémentarité entre les programmes. C’est ainsi que par la loi du 2 août 1989 un président commun à Antenne 2 et FR3 est instauré. Son rôle est notamment de nommer les directeurs généraux d’Antenne 2 et d’FR3 et ainsi d’atteindre les objectifs de complémentarité aux fins de renforcement du service public. 



C’est donc ici, dans cet immeuble de la fin du XIXème siècle de l’architecte Henri Grandpierre, que s’installe le 10 août 1989 Philippe Guilhaume nommé Président d’Antenne 2-FR3 par le tout jeune CSA. L’homme était auparavant PDG de la SFP 
A l’antenne pour le télespectateur, le rapprochement se fait en premier lieu par le biais de bandes annonces d’émissions d’FR3 sur Antenne 2 et inversement. Un nouvel habillage et un nouveau logo sont mis en place pour Antenne 2 à la fin de l’année 1990 et au début de 1991 pour FR3 afin que cette évolution s’exprime aussi visuellement.
Au niveau des programmes, des émissions sont supprimées à l’image de Champs-Élysées de et avec Michel Drucker. Le déficit de la deuxième chaîne se creuse. Quant à FR3, la fin de l’année 1990 est marquée par une série de grèves afin d’obtenir une revalorisation pour les journalistes de la chaîne. Le premier PDG ne pourra pas compter sur le pouvoir politique qui fait savoir en coulisse que ce choix du CSA n’était pas le sien. Le 19 décembre 1990, Philippe Guilhaume est poussé à la démission et remplacé dans la foulée par Hervé Bourges. 
Ce dernier avait redressé TF1 lorsque la chaîne était encore publique et moribonde derrière Antenne 2. 

L’objectif du nouveau PDG est de faire d’Antenne 2 et de FR3 le nouveau socle de la télévision publique à l’image de ce que sont la BBC au Royaume-Uni ou de la Rai en Italie. 
Cela se fera avec des économies conséquentes et un plan de restructuration sur les deux chaînes avec déjà le souhait de fusionner certaines activités. Hervé Bourges ne s’en cache pas, pour lui le projet de présidence commune n’est pas un projet fini et doit aboutir à une fusion totale en une seule société. Après avoir démantelé le service public depuis le milieu des années 70, l’heure semble maintenant d’un retour en arrière. C’est ainsi qu’au mois de juin 1991, Hervé Bourges présente son plan stratégique pour les télévisions publiques avec toujours en ligne de mire la fusion des deux sociétés nationales de télévision sous le leitmotiv de « Redresser , rapprocher et regrouper ». Ainsi Hervé Bourges reconstitue son équipe de TF1 avec Alain Denvers à la tête de l’information d’Antenne 2 et de l’information nationale d’FR3 et de Pascal Josèphe en tant que directeur général adjoint sur les deux chaînes. 

Symboliquement les deux chaînes changent de nom au mois de septembre 1992 pour devenir France 2 et France 3 au sein d’une entité nommée France télévision qui juridiquement ne constitue pas une entité. On n’en est pas encore à une fusion des deux sociétés mais l’idée est déjà là et fera son chemin. En premier lieu, au-delà de la présidence commune, il s’agit de regrouper les deux chaînes publiques au sein d’un même siège. Ce sera le souhait d’Hervé Bourges qui sera voté par les conseils d’administration de France 2 et France 3 en 1995 avec le nouveau PDG, Jean-Pierre Elkabbach. Ce dernier consolidera le travail d’Hervé Bourges et de ses équipes avec une politique éditoriale offensive hissant le service public, plus particulièrement France 2, parfois devant la chaîne numéro un des audiences, TF1. Cette bataille pour l’audience s’accompagnera de polémiques notamment avec l’affaire des animateurs-producteurs de France 2 et les contrats passés avec certaines des vedettes de la deuxième chaîne.
En 1998, France télévision quitte l’avenue d’Iéna en même temps que France 2 l’avenue Montaigne et France 3 la Maison de la Radio pour rejoindre le flambant nouveau siège de ce qui deviendra le groupe France télévisions à l’Esplanade Henri de France dans le 15ème arrondissement de la capitale.

Pendant près de 10 ans, le service public a opéré sa mue dans ces locaux de l’avenue d’Iéna pour redevenir un groupe incontournable dans le paysage audiovisuel français.

Photos©Balades télévisuelles

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