116 avenue du Président Kennedy (Paris 16ème)

Métro : Avenue du Président Kennedy (RER C)
Lieu notable : Maison de la Radio et de la Musique
Jusqu’en 1964, cette artère portait le nom de Quai de Passy. Elle est depuis un hommage au 35ème président des Etats-Unis d’Amérique assassiné le 22 novembre 1963

La construction d’un bâtiment dédié aux activités radiophoniques était un projet qui existait depuis la fin des années 40. L’idée était tout d’abord de regrouper l’ensemble des services de la RDF puis de la RTF disséminés dans Paris. La radiodiffusion et la télévision étaient ainsi réparties sur 23 sites dont certains n’étaient pas véritablement adaptés aux activités radiophoniques. En effet, les studios d’enregistrement étaient généralement situés dans des immeubles anciens destinés à l’origine à l’habitation. Il devenait donc nécessaire que la France se dote d’un immeuble moderne capable de répondre à ces problématiques mais également d’asseoir la radiodiffusion, et accessoirement la télévision, dans l’histoire moderne des media.
Un temps envisagé du côté de Sèvres, c’est finalement à Paris que le projet prendra forme. D’un point de vue pratique tant pour l’organisation des différentes émissions que pour la proximité géographique des lieux culturels et politiques, la Maison de la Radio ne pouvait être édifiée en dehors de la capitale.
C’est ainsi que le 10 juillet 1952, le terrain situé quai de Passy fut concédé par le conseil municipal de Paris à la RTF. Il faudra attendre près de dix ans avant de voir la bâtisse s’imposer sur ce terrain.

Au début, une partie des habitants du quartier souhaitaient garder le terrain de sport qui s’était établi sur le terrain vague d’alors. Néanmoins, le projet de la RTF continuera son chemin et le 26 mai 1953, c’est le projet de l’architecte Henry Bernard qui est retenu pour la Maison de la Radio. L’idée motrice est un bâtiment circulaire dominée par une grande tour centrale. Outre l’esthétisme de l’ensemble s’imposant dans le paysage urbain, c’est le travail opéré sur l’acoustique qui a conduit à l’architecture du bâtiment. Ainsi, plus de soixante studios de forme trapézoïdale pourront s’insérer dans ce vaste ensemble permettant une qualité sonore d’enregistrement adéquate. En son centre s’élèvera une tour de 22 étages chargée d’accueillir les archives de la RTF puis de l’ORTF. Témoin de son époque, l’ensemble abritera également des abris atomiques mais exploitera également la géothermie afin de climatiser et de chauffer le bâtiment. Un projet monumental.
C’est en 1958 que la Maison commence à sortir de terre mais il faudra attendre le samedi 16 décembre 1963 pour que ce temple moderne de la radiodiffusion soit inauguré par le Général de Gaulle accompagné du ministre de l’Information Alain Peyrefitte. Ce dernier soulignera à cette occasion que la Maison de la Radio est « le symbole de la civilisation du son et de l’image. ».
Quelques mois plus tard, au mois de juin 1964, la RTF est remplacée par l’ORTF. Cet ajout d’un O au fameux logo atome de la RTF a pour but de souligner une plus grande autonomie au nouvel établissement public de l’audiovisuel. Ainsi l’ORTF n’est plus placée sous l’autorité du ministre de l’Information mais sous sa tutelle. Cette nouvelle période qui s’ouvre en 1964 marque également un nouveau chapitre dans l’histoire de la radio et de la télévision avec une assise de leur popularité mais également soulignant la fin de l’ère des pionniers. L’ORTF établira son siège au sein du bâtiment qui prendra alors le nom officiel de Maison de l’ORTF. Le pouvoir décisionnaire ayant attrait aux activités télévisuelles et radiophoniques se situe au sein de ce que l’on appelle encore aujourd’hui la Maison Ronde.
Pendant près de dix ans, la Maison de l’ORTF deviendra le symbole médiatique de « la voix de la France » jusqu’en 1974. Avec l’élection de Valéry Giscard d’Estaing à la présidence de la République, l’ORTF est supprimée par la loi du 7 août 1974 avec la création de sept entités publiques autonomes : trois chaînes de télévision (TF1, A2 et FR3), une société de radiodiffusion (Radio France), un établissement de diffusion (TDF), un établissement de production audiovisuelle (SFP) et enfin un établissement consacré à la recherche et aux archives audiovisuelles (INA).

L’ORTF cesse officiellement d’exister le 1er janvier 1975 mais c’est le 6 janvier 1975 que le fameux logo atome disparaît des écrans de télévision fermant la fin d’une histoire et ouvrant les portes de la concurrence télévisuelle.
C’est Radio France qui héritera du 116 avenue du Président Kennedy et le fera savoir en ce début janvier 1975 en débaptisant le fronton de l’immeuble par son nouveau sigle qui reprend jusque dans le logo les caractéristiques architecturales de la Maison de la Radio. Ce logo signature se retrouve encore de nos jours témoignant de l’importance du bâtiment dans notre histoire radiophonique.
Si ce lieu est consacré en grande partie à la radiodiffusion, la télévision y trouvera également une assise. Ainsi, FR3 installera son siège dans ces différents bureaux. Il faut dire que l’histoire de la 3ème chaîne est intimement liée à la radiodiffusion. En effet, à sa naissance le 31 décembre 1972, la 3ème chaîne couleur ou C3 (pour reprendre le sigle utilisé par l’ORTF)  réalise au sein des studios de la Maison de l’ORTF son journal télévisé en collaboration avec la radio France Inter : Inter 3. Lors de l’éclatement de l’ORTF, FR3 prend en charge non seulement le 3ème réseau de télévision mais également les stations radiophoniques des régions et d’outre-mer (« FR3, c’est aussi la radio ! »). Ce n’est qu’en 1983 qu’FR3 se voit décharger de ces dernières activités au profit de Radio France (avec ce qui deviendra France Bleu) et de RFO. A partir de cette date, FR3 se concentrera sur la 3ème chaîne de télévision et de ses antennes régionales. Pour autant, le 114 avenue du Président Kennedy demeurera l’adresse de son siège social jusqu’en 1998 pour son intégration au sein du nouveau siège de France télévision.

En dehors de cette vie administrative, la télévision a également produit de nombreuses émissions au sein de la Maison de la Radio, des émissions qui auront marqué la mémoire des téléspectateurs. Ces programmes furent enregistrés au sein des studios 101 et 102 situés au rez-de-chaussée de l’immeuble. De nombreuses personnalités du petit écran y écriront leur histoire et leur notoriété.
Ainsi le studio 102 est à Guy Lux ce que l’Empire était à Jacques Martin ou le Studio Gabriel à Michel Drucker. Il s’agit sans aucun doute d’un studio indissociable du grand animateur de la télévision française.
C’est depuis le studio 102 que Guy Lux anime avec Anne-Marie Peysson, à partir de 1965, le Palmarès des Chansons sur la première chaîne de télévision de l’ORTF. Ce grand rendez-vous de variété permettait à de jeunes artistes de reprendre des titres de chanteurs populaires. Les téléspectateurs devant établir un classement qui devait se rapprocher au plus près de celui établi par un jury de professionnels. L’émission est aussi l’occasion des fameux « coup de chapeau » avec un focus particulier sur un artiste, Cette séquence donnera lieu à un événement mémorable avec les adieux télévisuels de Jacques Brel le 10 novembre 1966. Le studio 102 connaîtra alors une forte affluence et sans doute un moment historique tant dans l’histoire de ce médium que de la chanson.

Guy Lux investira également ce lieu pour ses autres émissions de variétés telles que Ring Parade, Top Club ou bien encore Cadence 3. Les années 80, donneront l’occasion à un autre animateur d’associer son nom à cette salle de la Maison de la Radio. Christophe Dechavanne y présentera en effet à partir de 1985 sa première grande émission : C’est encore mieux l’après-midi. Tous les jours sur Antenne 2, il propose un rendez-vous de variétés, de chroniques et d’un brin d’érotisme. Les ingrédients de ses futures émissions sont déjà-là et l’homme y construit son talent. Par la suite et toujours du même studio, il animera sur TF1 l’un des ses grands succès télévisuels, Coucou c’est nous !
Au milieu des années 90, ce studio sera aussi le point d’orgue de la carrière télévisuelle de Jean-Luc Delarue à travers son émission Ça se discute sur France 2. Cette émission marque un véritable tournant pour l’animateur et producteur après une carrière sur TV6 et Canal+. Elle lui permet d’asseoir sa popularité tout en participant au débat public sur des sujets de société.
Peut-être moins connu ou reconnu, le studio 101 aura également contribué à faire de la Maison de la Radio un lieu de télévision avec une focalisation particulière sur le divertissement.
C’est ici que l’humoriste Thierry Le Luron installera, au début des années 70, sa première émission Le Luron du dimanche sur la première chaîne de l’ORTF. C’est également dans ces lieux que Jacques Martin et sa bande installeront, à partir du 19 janvier 1975 sur la toute jeune TF1, une émission satirique qui fera date dans l’histoire de la télévision : Le petit rapporteur. Stéphane Collaro, Pierre Bonte, Pierre Desproges, Daniel Prevost ou bien encore Piem jetteront, pendant un an et demi, les bases d’une popularité qui ne se démentira pas par la suite auprès du grand public. C’est une émission référence pour cette équipe à commencer par Jacques Martin (co-créateur avec Bernard Lion) qui sera la première grande étape de sa carrière flamboyante.
Le studio 101 est également lié à la carrière de Danièle Gilbert qui anima avec succès la plupart de ses émissions de la mi-journée durant cette même décennie : Midi magazine, Midi trente et Midi première sur TF1. Des rendez-vous quotidiens autour de personnalités de la chanson qui se clôtureront au début de la décennie 80. Dans un registre radicalement différent, le Studio 101 accueillera, entre 1974 et 1995, les candidats à l’élection présidentielle pour le fameux débat télévisé du second tour de l’élection. Des événements où chaque détail, de la réalisation au décor, fera l’objet d’un suivi scrupuleux par les équipes de campagne desdits candidats.

La vocation première de la Maison ronde n’était pas dévolue à la télévision et c’est donc assez logiquement que ces différents studios évolueront vers une approche radiophonique et musicale.
Ainsi, en 2014, après plusieurs années de grands travaux, les studios 102 et 103 sont réunis pour former l’Auditorium de Radio France, la salle de concert de prestige de la société publique devenant par la même la vitrine auprès du grand public de cette grande maison.
Quant au studio 101, s’il existe toujours, c’est également sous le signe de la musique que son histoire continue de s’écrire.
Depuis 2018, la Maison ronde est inscrite au titre des Monuments historiques permettant de protéger une grande partie de l’édifice.
En juin 2021, l’ensemble a été rebaptisé Maison de la Radio et de la Musique rappelant ainsi les concerts organisés par Radio France et ses différentes stations radiophoniques mais également le soutient de la société publique aux artistes de la chanson et de la musique.
La télévision a-t-elle définitivement dit au revoir au 116 avenue du Président Kennedy ? Pas tout à fait puisque le studio 221 a été conçu pour certaines émissions de la chaine de télévision France Info accouplée à la station radiophonique du même nom. Des pages de l’histoire du petit écran restent sans doute encore à écrire au sein de cette grande institution.

Photos©Balades télévisuelles

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