Métro : Alma-Marceau (Ligne 9)
Lieu notable : Ancien siège de M6
La voie prend le nom d’Albert Ier qui avait régné sur le Royaume de Belgique de 1909 à 1934 et qui s’était notamment illustré lors de la 1^ère guerre mondiale

Non loin des anciens locaux de la rédaction de France 3, l’immeuble à l’angle du 16 Cour Albert Ier et de la Rue Bayard a accueilli pendant 10 ans une petite chaîne qui a, au fur et à mesure des années, monté les échelons du paysage audiovisuel français : M6.

L’aventure de la deuxième sixième chaîne française aurait pu être également celle de la deuxième cinquième chaîne française. A l’origine du projet se trouve le groupe luxembourgeois CLT, grand groupe de radio et de télévision. En France, c’est à travers à la radio RTL que ses activités médiatiques sont les plus visibles et de manière plus confidentielle avec la chaîne RTL télévision diffusée en Lorraine compte tenu de sa proximité géographique avec le Grand-Duché de Luxembourg. Au milieu des années 80, la fièvre de la libéralisation des ondes s’empare de la France avec notamment la création de de deux chaînes de télévision gratuites. La CLT ne peut passer à côté d’une telle opportunité mais la première aventure se fera sans elle. En 1986, quelques mois après leur création, les concessions de La Cinq et de TV6 sont résiliées. Cette fois le groupe luxembourgeois croit en son avenir télévisuel en France. Si dans un premier temps, elle oriente son choix sur La Cinq pour la transformer en RTL5, rapidement elle se rend compte que le cinquième réseau est déjà promis au groupe Hersant. Ne reste alors plus que la sixième chaîne. Elle va s’allier dans ce projet avec la Lyonnaise des Eaux qui vient de lancer la chaîne Paris Première sur le réseau câblé parisien et qui souhaite, sous l’impulsion de son directeur des activité audiovisuelle Nicolas de Tavernost, se lancer dans le grand bain de la diffusion hertzienne. Durant un moment, il fut envisagé une alliance avec les actionnaires de TV6 mais cela n’aboutit pas.

La CLT et La Lyonnaise des Eaux s’unissent donc dans le projet Métropole Télévision. Ce projet possède plusieurs atouts. Tout d’abord, il s’agira d’une chaîne généraliste à dominante musicale. C’est-à-dire qu’elle s’inscrit dans la continuité de TV6 en consacrant 30% de son temps d’antenne à la diffusion de programmes musicaux mais elle vise un public généraliste avec de l’information, de la fiction et du divertissement comme aurait pu le faire TV6 par la suite.  Par ailleurs, la Lyonnaise des Eaux est, avec son président Jérôme Monod, proche politiquement du pouvoir en place. Quant à la CLT, son positionnement médiatique et géographique lui confère les arguments finaux pour faire basculer les dernières hésitations de la CNCL. Si dans un premier temps, la balance semble pencher en faveur de TV6, la CNCL finit par octroyer le 23 février 1987 la concession du sixième réseau au groupe Métropole Télévision emmené par Jean Drucker. La nouvelle chaîne prendra à l’antenne la succession de TV6 le 1^er mars 1987. Quelques jours seulement pour créer une chaîne de télévision, le défi est relevé.

Comme un pari sur l’avenir, le 16 cours Albert Ier fut préempté avant même la décision de la CNCL Le choix n’est pas anodin. Situé dans le triangle d’or de Paris et non loin de la Tour Eiffel, l’immeuble est surtout à proximité du 22 rue Bayard où se trouve la station de radio RTL qui sera mise à contribution pour le fonctionnement de la chaîne de télévision.
RTL6 devait être le nom de cette sixième chaîne mais à quelques jours du lancement un changement de nom devint nécessaire afin de ne pas rendre trop visible l’un des actionnaires de la chaîne et éviter ainsi de faire de la publicité pour la station de radio. Il est repris le M de Métropole Télévision auquel on accola logiquement le chiffre 6.

A son lancement le dimanche 1^er mars 1987, M6 suit, par nécessité, la même stratégie que La Cinq une année plus tôt. C’est-à-dire qu’elle reprend les émissions et les animateurs de RTL Télévision. Toutefois, dès le premier jour le ton est donné. M6 ne joue pas (pour le moment) dans la cour des grands. Aucune star, aucun combat frontal avec les autres chaînes mais une place à se faire dans un paysage audiovisuel français incertain. Les premiers mois servent d’expérimentation, M6 a été créé en toute hâte.
Ce n’est que le 1^er septembre 1987 que la sixième chaîne montre un visage qui la distinguera des autres. Une petite chaîne jouant la contre-programmation avec des émissions sans paillettes mais efficaces. M6 ne reproduira pas les erreurs de La Cinq et son statut d’outsider se révélera au fur et à mesure du temps être un formidable atout.
Patiemment mais sûrement elle s’installera parmi les autres chaines de télévision avec moins de moyens. Le pari se révèlera être gagnant, appuyé également par la disparition de La Cinq en 1992. 

La sixième chaîne peut alors envisager un avenir plus radieux avec pour commencer une diversification de ses activités M6 ne sera pas seulement une chaîne de télévision mais un groupe complet de communication. C’est ainsi qu’en 1992 naît M6 Interactions qui sera en charge de la commercialisation et l’édition de musiques et de films. Et puis en 1993 le 16 Cours Albert Ier accueille une nouvelle chaîne Serie Club filiale à 100% du groupe M6.
Avec un équilibre financier et des activités en expansion, M6 est fin prête pour rentrer dans la cour des grands. Un besoin d’espace des locaux se fait ressentir. Fort de ce nouveau statut, M6 déménage pour son dixième anniversaire dans un immeuble flambant neuf au 89 avenue Charles de Gaulle à Neuilly sur Seine. La sixième chaîne pouvait ainsi clore brillamment ce premier chapitre de son existence.

Tout comme pour le bâtiment situé 28 Cours Albert Ier, il ne reste aujourd’hui aucune trace du passé télévisuel de ce bâtiment. Les locaux sont en effet aujourd’hui occupés par une société proposant des bureaux en co-working.

Photos©Balades télévisuelles